INVITEE NICOLE BERTOLT
Ecouter : 2 heures avec elle pour évoquer Boris Vian.
"Il faut choisir : se reposer ou être libre". Thucydide
BORIS a choisi. Pendant les quelques 20 années de sa vie entre 1940 (il a 20 ans) et sa mort en 1959 il se jeta à corps perdu dans le courant exalté d’une vie qu’il savait être courte. Ce faisant il est l’image même de l’homme libre. L’éclat fulgurant de cette liberté et de cet appétit de vivre nous illumine encore aujourd’hui.
Joueur de trompette dans les austères bureaux de l’Association française de Normalisation en même temps qu’il découvrait le jazz, fraichement débarqué d’Amérique avec la paix de 1945, dans les caves du quartier latin, sa frénésie ne se relâche pas. Il fonce… « sans tambour (mais avec) trompette ».
A peine sorti, au petit matin, du « Lorientais », le club de jazz de Claude Luter, au pied de la Montagne Ste Geneviève, qu’il prend sa plume « « libre » pour se lancer dans le roman noir à l’américaine. « Bien que signé du nom très english de «Vernon Sullivan, ce « J’irai cracher sur vos tombes », fait s’étrangler de rage la « bonne » société confite en gaullisme galonné. La censure « républicaine » sévit…succès garanti.
Sans relâche et sans états d’âme il poursuit inlassablement sa passion pour le roman, l’humour, la dérision, le gout de vivre, la nostalgie de « L’Ecume des Jours » ; tout cela, c’est Boris.
Et puis c’est la poésie avec son ami Raymond Queneau, sa complicité avec Jacques Prévert et bien d’autres écrivains, chanteurs et joueurs de mots. Sa plume pleine de verve n’a pas de répit. Sa curiosité et son esprit frondeur le conduisent. Il va même, avec un compositeur complice, jusqu’à se lancer à sa manière pataphysicienne et cinématographique, dans l’opéra. Lancelot, son chevalier de la Table Ronde, blanc « comme neige », l’inspire.
Tout cela et bien d’autres clins d’œil à la vie, vous le découvrirez à la Bibliothèque Nationale puisqu’on l’expose (sic) jusqu’au 15 janvier 2012. Serait-il d’accord ? Lui, ce farouche combattant des Institutions de l’État gendarme et guerrier. C’est cet État « nationaliste », accapareur de ses ennemis pour les muséifier, qu’il a combattu, soit en riant dans sa chanson de ces « gendarmes qui l’ont bousculé, et plus gravement dans « Le Déserteur ». Refuser de tuer, de faire la guerre, de renoncer, en se soumettant à l’« enrôlement » de la conscription tout autant qu’au fétichisme du vote, à sa liberté, à sa particularité d’individu solidaire, créatif, combatif et passionné, ce fut sa vie. Salut Boris et « Bon Vian ».
AZ 25 novembre 2011